Au cours des départs du 3, 5 et 7 août 1942 dans les camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande, les déportés ont tous dû subir une fouille méthodique. Tout leur était pris: papiers, livret de famille, rouge à lèvres, etc. Sachant qu’on les dépouillerait de toute valeur et du moindre bijou qu’ils avaient sur eux, ils les cachaient à la hâte ou les jetaient dans les latrines.
Cet épisode de la fouille demeure tabou à Pithiviers et à Beaune. Mais il a laissé des souvenirs très précis. Beaucoup n’ont pas oublié que si les hommes étaient fouillés par les gardiens, on recrutait des femmes sur place pour fouiller les déportées, et qu’il y eut des volontaires pour la besogne. Elles furent souvent les plus brutales, certaines arrachant parfois les boucles des oreilles lorsque cela n’allait pas assez vite. La rémunération de ces « fouilleuses » est officiellement fixée par le 2ème bureau de la 1ère division de la préfecture du Loiret:
Tarif de jour (7h à 19h): 8 Francs de l’heure.
Tarif de nuit (19h à 1h): 12 Francs de l’heure.
Annette Monod se souvient de ces fouilleuses: « Quand je les voyais arriver, j’avais honte de voir des compatriotes accepter de faire ça. C’étaient des jeunes femmes de Beaune. »
Episode tabou parce qu’on se souvient également très bien de ces gardiens ratissant plus tard, le contenu des latrines, à la recherche de bagues, de bracelets, de colliers brisés…Même après la guerre et le démontage du camp, quelques habitants iront tenter leur chance en retournant encore une fois la terre…
Eric Conan, Sans oublier les enfants, Les Camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande, 19 juillet- 16 septembre 1942, Grasset, 1991, p. 107.108.