Dans le wagon plombé
J’ai fait tout le voyage au fond d’un plein wagon
De nuit, de sang, de cris, de larmes et de plomb
Sans rien savoir, sans un recours, sans charité
Debout sans rien manger, sans boire en plein été
Sans autres compagnons que malades ou morts
Je n’avais d’autre lit que l’urine ou les corps.
Il n’y avait pas d’eau, il n’y avait pas d’air.
Pas un manteau sur moi si c’était en hiver
Et je n’ai paa bu chaud dans ce tombeau glacé!
Tant de jours à trembler! Tant d’heures à passer
Debout dans cette foule et seul en mon tourment
Et sans pouvoir m’étendre, ou dans mes excréments.
Mais il y avait pire et mon regard s’enfuit.
Bien pire que les jours, il y avait les nuits!
Comment vous les décrire? Avec quels documents
Pour voir si je dis vrai ou bien si je vous mens?
C’est peut-être en été, c’est peut-être en hiver
C’était toujours la nuit, c’est encore l’enfer
Ces nuits, ces jours passés de Drancy jusqu’aux fours
Ces heures et ces nuits, elles durent toujours.
(Un génocide en héritage, Tableaux de David Olère, Texte d’Alexandre Oler, 1998, Wern Editions, p.20)