Peu importe ce que tu racontes.
Sans spectacle, tu n’existes pas, au sens le plus étymologique.
Tu ne peux t’exprimer, tu demeures une nature morte ou silencieuse.
Anders place la première chosification absolue de l’homme dans la Shoah. Il la décrit comme un génocide « qui se fonde sur des images ».
Le rapport entre la société du spectacle et la Shoah est le suivant: « Il est on ne peut plus logique que ceux d’entre nous qui réussissent de la façon la plus spectaculaire à avoir de multiples existences (et à être vus par plus de gens que nous, le commun des mortels), c’est-à-dire les stars de cinéma, soient des modèles que nous envions. La couronne que nous leur tressons célèbre leur entrée victorieuse dans la sphère des produits en série que nous reconnaissons comme « ontologiquement supérieurs ». C’est parce qu’ils réalisent triomphalement notre rêve d’être pareils aux choses, c’est parce qu’ils sont des parvenus qui ont réussi à s’intégrer au monde des produits, que nous en faisons des divinités. » L’Obsolescence de l’Homme, 1958, vol I, p.76.
Imre Kertész avait raison: la Shoah est bien l’essence de la modernité.
« Le spectacle ne peut être compris comme l’abus d’un monde de la vision, le produit des techniques de diffusion massive des images. Il est bien plutôt une Weltanschauung devenue effective, matériellement traduite. C’est une vision du monde qui s’est objectivée. » Debord, La Société du Spectacle, 1967.
Qui oserait encore penser que le spectacle n’est plus moyen au service d’une fin, mais fin en soi, essence de la technique, non pas instrument, mais instrumentalisation de l’homme? Solution technique, ré-création, réponse au problème de l’existence! « Le caractère fondamentalement tautologique du spectacle découle du simple fait que ses moyens sont en même temps son but. » Debord
Appliquée au spectacle, la déclaration suivante d’Anders prend toute sa mesure: « Agis de telle façon que la maxime de ton action puisse être celle de l’appareil dont tu es ou vas être une pièce. » L’Obsolescence de l’homme, Vol II, p. 287.
Que le spectacle continue!
The Show must go on!
Vous allez voir ce que vous allez voir!